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​L'expulsion en "urgence absolue" est conforme à la Constitution

Public - Droit public général
07/10/2016
Les mots "sauf en cas d'urgence absolue" figurant au premier alinéa de l'article L. 522-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ne méconnaissent ni le droit à un recours juridictionnel effectif ni le droit au respect de la vie privée et sont, par conséquent, conformes à la Constitution. Telle est la décision adoptée par le Conseil constitutionnel le 5 octobre 2016.
En l'espèce, le Conseil d'État avait saisi le Conseil constitutionnel le 6 juillet 2016 (CE, 2e et 7e ch.-r., 6 juill. 2016, n° 398371) d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la conformité aux droits et libertés, que la Constitution garantit, de l'article L. 522-1 du CESEDA. L'article prévoit, qu'en cas d'urgence absolue, l'autorité administrative peut prononcer l'expulsion d'un étranger sans que celui-ci ait été préalablement avisé et convoqué pour être entendu par la commission visée au 2° du même article.

Le requérant affirmait que le législateur, en ne définissant pas la notion d'urgence absolue et en ne prévoyant pas de garantie faisant obstacle à la mesure, avait porté une atteinte injustifiée et disproportionnée au droit à un recours juridictionnel effectif résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen (DDHC), ainsi qu'au droit au respect de la vie privée reconnu par l'article 2 de cette même Déclaration. Les juges de la rue Montpensier ont relevé, en premier lieu, que l'urgence absolue répondait à la nécessité de pouvoir, en cas de menace immédiate, éloigner du territoire national un étranger au nom d'exigences impérieuses de l'ordre public. En deuxième lieu, ils ont estimé que les dispositions contestées ne privaient pas l'intéressé de la possibilité d'exercer un recours contre la décision d'expulsion devant le juge administratif, notamment devant le juge des référés qui peut suspendre l'exécution de la mesure d'expulsion ou ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale.

Enfin, ils ont estimé que si le requérant critiquait l'absence de tout délai entre, d'une part, la notification à l'étranger de la mesure d'expulsion et, d'autre part, l'exécution d'office de cette mesure, cette absence ne résultait pas des dispositions contestées. En outre, en cas de contestation de la décision distincte déterminant le pays vers lequel l'étranger est renvoyé, il résulte de l'application combinée des articles L. 513-2 et L. 523-2 du CESEDA qu'il appartient au juge administratif de veiller au respect de l'interdiction de renvoyer un étranger "à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la CESDH ". Le Conseil conclut donc à la solution susvisée.
Source : Actualités du droit