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PPE - SNBC : deux décrets pour concrétiser la politique Énergie-Climat

Environnement & qualité - Environnement
11/05/2020
La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) établit les priorités gouvernementales en matière d’énergie pour les dix prochaines années. La stratégie nationale bas-carbone (SNBC) dresse notre feuille de route pour atténuer le changement climatique. L’une et l’autre sont les piliers du plan Énergie-Climat voulu notamment par le règlement (UE) n° 2018/1999 sur la gouvernance de l’énergie et de l’action pour le climat.

Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE)

La PPE est encadrée par les articles L. 141‑1 à L. 141‑6 du code de l’énergie, modifiés par la loi n° 2015‑992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, et par la loi n° 2019‑1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat. Révisée tous les 5 ans, elle définit les priorités d’action des pouvoirs publics pour la gestion des formes d’énergie sur le territoire métropolitain sur la période 2019‑2028. Elle est constituée du décret du 21 avril 2020 lui-même, d’un document de près de 400 pages, annexé audit décret et d’une synthèse des orientations et actions de la PPE, disponibles sur le site du Ministère de la transition écologique et solidaire (MTES).

Objectifs

Avec comme étalon de référence la consommation de 2012, le décret fixe d’abord des objectifs de réduction :
de la consommation d’énergie primaire fossile :
- gaz naturel : - 10 % en 2023 et - 22 % en 2028 ;
- pétrole : - 19 % en 2023 et - 34 % en 2028 ;
- charbon : - 66 % en 2023 et - 80 % en 2028.
et de la consommation finale d’énergie de moins 7,5 % en 2023 et  16,5 % en 2028.
Sont par ailleurs fixées les ambitions de développement des énergies renouvelables à l’horizon 2023, et 2028 avec, pour cette seconde échéance, une fourchette haute et une fourchette basse pour chacune des énergies visées. Ainsi, avec un très grand coup d’accélérateur pour le solaire, les objectifs, pour les trois principales sources d’ENR sont :
éolien terrestre : 24,1 GW en 2023 et entre 33,2 et 34,7 GW en 2028 ;
solaire : 20,1 GW en 2023 et entre 35,1 et 44 GW en 2028 ;
hydroélectricité : 25,7 GW en 2023 et entre 26,4 et 26,7 GW en 2028.
S’ajoute à ces objectifs, celui de porter la part des énergies renouvelables à 7 % de la consommation de gaz en 2030 en cas de baisse de coûts de production du biométhane.
Pour accompagner concrètement ses caps, des projets de stockage pour l’hydoélectricité seront soutenus et un calendrier indicatif de lancement des procédures de mise en concurrence et de sélection de lauréats des appels d’offre est fixé. Le développement de la chaleur et du froid renouvelables et de récupération livrés par les réseaux de chaleur et de froid se voit également alloué des objectifs à atteindre.
La mobilité propre n’est pas oubliée avec, par exemple, la mise sur le marché souhaitée fin 2023 de 660 000 véhicules électriques (3 000 000 en 2028) ou encore de 500 000 véhicules particuliers hydrides rechargeables (1 800 000 en 2028). Des objectifs de développement des capacités d’effacement électrique de tout type sont également fixés.

Portée juridique

La PPE souligne notamment la portée normative des objectifs quantitatifs pour le lancement d’appels d’offres pour des installations de production d’électricité, pour des capacités d’effacement de consommation électrique ou pour des investissements permettant l’injection de biométhane dans les réseaux de gaz.
Notons, qu’elle doit naturellement être compatible avec les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre fixés par les budgets carbone et plus largement avec la stratégie bas-carbone (SNBC) concomitamment adoptée.
Par ailleurs, les stratégies et les documents de planification comportant des orientations sur l’énergie doivent être compatibles avec la PPE. Plusieurs documents de programmation doivent ainsi s’articuler avec la PPE :
  • la stratégie pour le développement de la mobilité propre (SDMP) ;
  • la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse (SNMB) ;
  • le plan de programmation de l’emploi et des compétences (PPEC) ;
  • la stratégie nationale de la recherche énergétique (SNRE).
En outre, il faudra veiller à la bonne articulation entre la PPE et les schémas régionaux traitant du climat, de l’air et de l’énergie, tels que les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’équilibre des territoires (SRADDET), qui prennent la suite des schémas régionaux climat-air-énergie (SRCAE)
Enfin, les objectifs de la PPE s’inscrivent dans le respect de nos engagements internationaux pris dans le cadre de l’Accord de Paris en 2015 et européens (Paquet Énergie Climat, Règl. sur la gouvernance précité, etc.).

Stratégie nationale bas-carbone (SNBC)

Pendant du décret n° 2020‑456 du 21 avril 2020 sur la PPE, un second décret de même date adopte les budgets carbone nationaux et à la stratégie nationale bas-carbone. Tout comme la PPE, la SNBC est disponible sur le site du MTES.

Objectifs

Faisant l’objet d’une révision tous les cinq ans, la SNBC fixe des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre (budgets carbone) avec deux ambitions : atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 et réduire notre empreinte carbone.
Le nouveau décret définit d’abord globalement les budgets carbone de la France. Pour les périodes 2019‑2023, 2024‑2028 et 2029‑2033, ils sont fixés respectivement à 422, 359 et 300 Mt de CO2eq par an (hors émissions et absorptions associées à l’usage des terres et à la foresterie). Il fixe ensuite ces budgets carbone par grand secteur d’activité et par type de gaz.

Portée juridique

Si les orientations stratégiques de la SNBC sont engageantes pour tous les citoyens, elles s’adressent en priorité aux décideurs publics, en particulier aux échelons national, régional et intercommunal. Ainsi la stratégie et les budgets carbone sont-ils juridiquement opposables pour le secteur public, principalement par un lien de prise en compte.
Sont spécifiquement concernés :
  • les documents de planification et de programmation qui ont des incidences significatives sur les émissions de gaz à effet de serre ;
  • les décisions de financement de projets publics qui doivent prendre en compte, entre autres, l’impact du projet en termes d’émissions de GES ;
  • la PPE, comme nous venons de le voir.
Citant le Conseil d’État, la SNBC rappelle que l’obligation de prise en compte impose de « ne pas s’écarter des orientations fondamentales sauf, sous le contrôle du juge, pour un motif tiré de l’intérêt de l’opération et dans la mesure ou cet intérêt le justifie » et qu’il en découle principalement qu’elle ne peut être ignorée et que les écarts devront être explicités et argumentés.

 
Source : Actualités du droit