Retour aux articles

Paiements pour services environnementaux : la Commission approuve le régime d’aide aux agriculteurs

Public - Droit public des affaires
19/03/2020
Après un examen approfondi du régime d’aide notifié par la France le 29 juillet 2019, la Commission européenne a jugé compatible avec le marché intérieur le dispositif de paiements pour services environnementaux (PSE) visant à valoriser la performance environnementale des exploitations agricoles.
Partant du constat que le secteur agricole est particulièrement concerné par la problématique du recul de la biodiversité ordinaire et pourrait constituer un domaine de reconquête de cette biodiversité, le gouvernement français a souhaité inciter les exploitants agricoles à s’engager dans « des modes de production à moindre impact environnemental, reposant sur les principes de l’agro-écologie ».
 
Le dispositif mis en place, officiellement dénommé « Valorisation des services environnementaux et incitation à la performance environnementale des exploitations » (enregistré sous le n° SA.55052 (2019/N)), a été jugé compatible avec le marché intérieur, conformément à l’article 107, paragraphe 3, c), du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Son budget global s'élève à 150 millions d’euros octroyés par le ministère de la Transition écologique et solidaire.
 
Une aide modulable…
 
Le dispositif incitatif de rémunération consiste en :
– « l’attribution, au niveau national, d’une valeur plafond aux services environnementaux » ;
– et « l’évaluation, au niveau d’une exploitation agricole, des services environnementaux rendus, par la mesure annuelle de la performance environnementale (…) ».
 
Cette performance sera appréciée au travers des caractéristiques, d’une part, des systèmes de production agricoles, et d’autre part, des modalités de gestion des structures paysagères (« infrastructures agro-écologiques », telles que les haies, forêts, mares, etc.).
 
Ce dispositif de PSE se veut « modulable pour s’adapter aux spécificités des territoires et responsabilisant pour les agriculteurs », dont l’évolution des systèmes d’exploitation conditionnera le montant des paiements perçus. Ainsi, un diagnostic initial de l'exploitation sera effectué et permettra de mesurer à la fin du contrat son évolution, « selon une grille de notation définie territorialement ».
 
Destiné aux petites et moyennes entreprises exerçant une activité agricole dans certaines zones éligibles, ce régime financé par l’Agence de l’eau compétente dans chaque zone sera en place jusqu’au 31 décembre 2021. Les entreprises en difficulté ne pourront pas en bénéficier.
 
… conforme au droit européen…
 
Selon l'article 107, paragraphe 3, c) du TFUE, peuvent être compatibles avec le marché intérieur « les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun ».
 
La Commission a constaté que les objectifs fixés par les autorités étaient conformes à ceux mentionnés au point 43 des lignes directrices de l'Union européenne concernant les aides d'État dans les secteurs agricole et forestier et dans les zones rurales 2014–2020, à savoir « garantir une production alimentaire viable » et « promouvoir l’utilisation efficace et durable des ressources, afin de parvenir à une croissance intelligente et durable ». Elle a ainsi retenu que l’aide, prévue dans le cadre du « Plan biodiversité » (lire à ce sujet Une mobilisation sans précédent pour la biodiversité ?, Actualités du droit, 10 juill. 2018), était « nécessaire à la réalisation des objectifs d'intérêt commun » de l’Union.
 
Lors de son minutieux examen, elle a également pu vérifier que le paiement pour services environnementaux :
– comporte l'effet incitatif nécessaire ;
– est proportionné ;
– répond aux exigences de transparence prévues les lignes directrices précitées (notamment par la publication sur un site internet de plusieurs informations relatives à l’aide en question).
 
Enfin, appliquant les points 108 et 113 des lignes directrices, l’institution européenne a estimé que les effets négatifs de l’aide, en termes de distorsion de la concurrence et d'incidence sur les échanges entre États membres, sont bien limités au minimum en regard des plafonds d'intensité applicables à ce type d'aide.
 
… et déjà amorcée
 
Le dispositif de PSE proposé doit être mis en œuvre dans le cadre de projets collectifs territoriaux portés par les collectivités territoriales ou leurs groupements.
 
Certaines Agences de l’eau avaient déjà engagé la démarche avant la décision de la Commission, en utilisant la règle « de minimis », qui permet d’octroyer des aides dans la limite de 200 000 € sur une période de trois années consécutives (comptées en exercices fiscaux). Ces aides, dites « de minimis », ne sont alors pas considérées comme des aides d'État (ce plafond incluant d’autres soutiens tels que les subventions ou aides fiscales par exemple). Ces régimes peuvent désormais évoluer vers celui validé par la Commission.
 
Pour aller plus loin
Pour des développements détaillés en matière d’aides d’État sous l’angle public, voir Le Lamy Droit public des affairesnos 775 et suivants.
Pour des développements détaillés en matière d’aides d’État sous l’angle privé, voir Le Lamy Droit économiquenos 2210 et suivants.
 
Source : Actualités du droit