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Le droit à la communication ne vaut pas droit à la reconstitution

Public - Droit public général
09/10/2019
Si les archives publiques sont des documents communicables de plein droit, un citoyen ne peut exiger de l’administration la reconstitution d’archives dans leur version d’origine lorsque celles-ci ont été altérées.
Des personnes avaient demandé au ministre de la Défense de leur communiquer les motifs de la sanction disciplinaire infligée à un lieutenant-colonel à la suite des événements survenus en 1944 à Thiaroye au Sénégal. Estimant que le ministre avait refusé de leur communiquer les motifs de la sanction, les requérants ont saisi le tribunal administratif de Paris en vue de l’annulation de la décision de refus. Face au rejet de leur demande, ils viennent se pourvoir en cassation devant le Conseil d’État.   
 
Droit à la communication …
 
Les requérants s’étaient vu, en application de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, communiquer les documents d’archives publiques, rendues « communicables de plein droit » en vertu de l’article L. 213-1 du code du patrimoine.
 
Toutefois, le document transmis portait des ratures, qui « avaient rendu illisible la mention des motifs de la sanction infligée au lieutenant-colonel ». Ces ratures avaient en effet été effectuées en application d’une loi d’amnistie du 16 août 1947, disposant : « il est interdit à tout fonctionnaire de l’ordre judiciaire de rappeler ou de laisser subsister, sous quelque forme que ce soit, dans un dossier judiciaire, les condamnations, peines disciplinaires et déchéances effacées par l’amnistie ».
 
L’absence de communication des motifs de la sanction n’était donc pas liée au refus de communication d’un document mais au fait que les motifs aient été raturés. À ce sujet, les requérants estimaient que l’Administration aurait dû utiliser les « moyens techniques permettant de lire des mentions qui ont été occultées sur un document ».
 
… ne vaut pas droit à établissement d’un nouveau document
 
Le tribunal administratif avait estimé « que la demande des requérants conduirait l’administration à établir un nouveau document au moyen de dispositifs techniques et qu’aucune disposition n’imposait à l’administration de le faire ».
 
Validant le raisonnement des juges du fond, la Haute cour déclare : « il excède les prévisions des articles L. 213-1 et suivants du code du patrimoine que l’administration soit tenue, si elle est saisie d’une demande de communication d’archives dans une version qui n’existe plus, de les reconstituer dans leur version d’origine ».
 
En l’espèce, les requérants « se sont vu communiquer l’intégralité des archives relatives au dossier administratif du lieutenant-colonel ». Ainsi, « c’est sans erreur de droit que le tribunal administratif (…) a rejeté la requête (…) au motif qu’aucune disposition légale ou réglementaire ne prévoyait l’obligation pour l’administration d’établir un nouveau document afin de répondre à leur demande de communication de documents présentant le caractère d’archives publiques ».
Source : Actualités du droit