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Transfert "Dublin" : pas de définition légale des risques de fuite du demandeur, pas de rétention administrative

Public - Droit public général
29/09/2017
En l'absence de disposition contraignante de portée générale, fixant les critères objectifs sur lesquels sont fondées les raisons de craindre la fuite du demandeur d'une protection internationale qui fait l'objet d'une procédure de transfert, l'article 28, § 2, du Règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 est inapplicable. Doit, par conséquent, être considéré comme irrégulier le placement en rétention d'un demandeur d'asile en procédure "Dublin".

Ainsi statue la Cour de cassation dans un arrêt du 27 septembre 2017. En l’espèce, M. X, de nationalité sri-lankaise, avait présenté une demande d'asile. Par arrêtés du 13 février 2017, le préfet avait décidé que celui-ci serait remis aux autorités et placé en rétention administrative au motif qu'il ne présentait pas les garanties propres à prévenir le risque de se soustraire à la mesure d'éloignement. Pour confirmer la prolongation de la rétention, l'ordonnance retenait que le placement était régulier en la forme et que les conditions de fond étaient remplies, dès lors que l'intéressé, dépourvu de passeport et connu sous un alias, n'avait pas communiqué d'attestation d'hébergement ni justifié de ses ressources, de sorte qu'il n'offrait pas de garanties suffisantes de représentation.

La Cour énonce, d'une part, qu'il résulte des articles 2 et 28 du Règlement (UE) n° 604/2013 que si les Etats membres peuvent placer les personnes concernées en rétention en vue de garantir les procédures de transfert conformément au règlement lorsqu'il existe un risque non négligeable de fuite de ces personnes, ce risque s'entend, dans un cas individuel, comme l'existence de raisons, fondées sur des critères objectifs définis par la loi, de craindre la fuite d'un demandeur de protection internationale, ressortissant de pays tiers ou apatride, qui fait l'objet d'une procédure de transfert. Elle ajoute, d'autre part, que selon la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), ces textes devaient être interprétés en ce sens qu'ils imposent aux Etats membres de fixer, dans une disposition contraignante de portée générale, les critères objectifs sur lesquels sont fondées les raisons de craindre la fuite du demandeur d'une protection internationale qui fait l'objet d'une procédure de transfert, que l'absence d'une telle disposition entraîne l'inapplicabilité de l'article 28, § 2, de ce Règlement et qu'une jurisprudence établie, sanctionnant une pratique constante de la police des étrangers, ne saurait suffire (CJUE, 15 mars 2017, aff. C-528/15).

Elle conclut, qu'en statuant ainsi, alors que l'article 28, § 2, du Règlement était inapplicable, le premier président a violé les textes susvisés. Elle ajoute, qu'en l'absence de doute raisonnable, quant à l'interprétation desdits articles, il n'y a pas lieu de saisir la CJUE d'une question préjudicielle.

Par Marie Le Guerroué
 

Source : Actualités du droit