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Exclusion de la qualité de réfugiée pour l'épouse d'une personne ayant séquestré et torturé, au domicile conjugal, un fonctionnaire du HCR

Public - Droit public général
13/06/2017
Doit être exclue de la qualité de réfugiée, l'épouse d'une personne ayant séquestré et torturé, au domicile conjugal, un fonctionnaire français du Haut Commissariat aux réfugiés (HCR). Telle est la décision rendue par le Conseil d'État le 7 juin 2017.
En l'espèce, par une décision du 22 décembre 2014, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a refusé à Mme B., et à ses trois enfants majeurs, de nationalité russe et d'origine tchéchène, la qualité de réfugié. Par une décision en date du 24 novembre 2015, contre laquelle l'OFPRA se pourvoit en cassation, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) leur a reconnu cette qualité à raison des risques de persécution encourus en cas de retour en Tchétchénie du fait de leur soutien au mouvement rebelle.

Le Conseil d'État rappelle les termes du paragraphe A, 2°, de l'article 1er de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 (N° Lexbase : L6810BHP), et de l'article 1 F de la même convention, excluant son bénéfice pour les personnes "dont on aura des raisons sérieuses de penser : [...] b) qu'elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d'accueil avant d'y être admises comme réfugiés ; c) qu'elles se sont rendues coupables d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies. ". Le Conseil constate, ensuite, que du 2 au 28 février 1998, un fonctionnaire français du HCR a été séquestré au domicile de M. et Mme B. à la suite de son enlèvement par un groupe criminel. Il ressort du témoignage produit par ce fonctionnaire que M. B. l'a régulièrement torturé pendant sa détention. Si ce fonctionnaire a indiqué ne pas avoir été en contact direct avec Mme B., son témoignage atteste néanmoins de ce qu'elle a contribué à la commission des agissements dont il a été victime et dont elle a persisté devant les juges du fond à nier la gravité. Dans ces conditions, le Conseil estime qu'en ne relevant pas qu'il y avait des raisons sérieuses de penser que Mme B., avait contribué à un crime grave de droit commun, constitutif d'un agissement contraire aux buts et principes des Nations- Unies, la CNDA a entaché son arrêt d'une erreur de qualification juridique des faits.

L'OFPRA est donc fondé à demander l'annulation de cette décision.

En revanche, le Conseil d'État écarte les moyens dirigés contre la décision accordant l'asile aux trois enfants.

Par Marie Le Guerroué
Source : Actualités du droit