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L’huile de palme n’est finalement pas un biocarburant

Environnement & qualité - Environnement
Public - Environnement
20/11/2019
Un vote du 14 novembre avait soutenu la reconnaissance de l’huile de palme comme un biocarburant éligible à des avantages fiscaux. Cette annonce avait provoqué de vives réactions de la part de nombreux députés et un second vote s’est finalement tenu le lendemain. Il s’est soldé par un rejet de l’amendement, le 15 novembre.
Votée pour la première fois il y a un an, l’exclusion explicite de l’huile de palme des biocarburants ne permettait pas aux entreprises l’utilisant de bénéficier des avantages fiscaux qui y sont normalement attachés (C. douanes, art. 266 quindecies).
Or, dans la nuit de jeudi à vendredi, un amendement n°II-2901 a été voté en ces termes :
« I. – Le dernier alinéa du 2 du B du V de l’article 266 quindecies du code des douanes est ainsi rédigé :
ʺ Les produits à base d’huile de palme ne seront plus considérés comme des biocarburants à compter du 1er janvier 2026.ʺ ».

L’un des députés à l’origine de cet amendement a souligné vouloir agir dans une optique de protection de l’industrie face à la concurrence étrangère, qui – au niveau européen – bénéficie de l’exonération jusqu’à 2030. Total de son côté s’était engagé à n’utiliser que de l’huile de palme « durable et certifiée » et de limiter son utilisation à 300 000 tonnes pour son installation de La Mède, dans laquelle plus de 200 millions d’euros avaient été investis afin d’en faire une bioraffinerie. Le sommaire de l’amendement, quant à lui, expliquait que son objet était de permettre « une période transitoire suffisante de stabilité fiscale et règlementaire aux acteurs économiques français, afin de se préparer avant la sortie complète de toutes huiles de palme des biocarburants ».

Levée de boucliers générale

Plusieurs députés et ONG ont exprimé leur vive opposition à ce vote en estimant que l’huile de palme était un danger et qu’elle ne pouvait être considérée comme biocarburant, même pour une durée limitée de trois ans. L’absence de débat avait également été pointée du doigt, par Nicolas Hulot notamment. Certains députés de la majorité, eux-mêmes, ont regretté « des signaux contradictoires » (Cédric Villani).
Le premier ministre Édouard Philippe a donc appelé à un second vote le vendredi 15 novembre, pour répondre « à l’absence d’un débat suffisant sur un sujet aussi important ». À noter que le gouvernement était officiellement favorable à cet amendement alors que le Rapporteur général de la Commission des finances s’y était opposé.

Deux votes opposés en l’espace d’un jour…

Et c’est finalement le refus des députés qui l’a emporté, avec 58 voix contre et 2 voix pour. Il y a donc une continuité avec la position du Conseil constitutionnel, qui le 11 octobre avait rejeté les demandes similaires de Total sur cette exonération fiscale (voir Avantages fiscaux pour l’huile de palme : refus Total du Conseil constitutionnel, Actualités du droit, 14 oct. 2019).
L’entreprise estime que la disparition de cette exonération pourrait coûter entre 70 et 80 millions d’euros par an à la raffinerie, ce qui met en péril les 250 postes directs que représente la structure. Emmanuelle Wagron a finalement annoncé la volonté du gouvernement de créer un groupe de travail pour voir s’il serait possible d’utiliser de l’huile de palme « qui ne déforeste pas ».
 
Source : Actualités du droit