Retour aux articles

Énergie et climat : retours et analyses de la loi adoptée par le Sénat

Environnement & qualité - Environnement
Public - Environnement
03/10/2019
Pluie d’évènements liés au climat ces derniers jours : réunion au sommet à New York, intervention médiatisée de Greta Thunberg, nouveau rapport du GIEC sur les océans… Le vote final de la loi énergie climat ayant eu lieu ce jeudi 26 septembre pouvait difficilement s’inscrire davantage dans l’actualité. Retour sur le contenu de la loi et les réactions qu’elle a suscitées.
Les grandes mesures de la loi inchangées
Fruit d’un accord entre les membres de la commission mixte paritaire le 11 septembre (v. Projet de loi Énergie et Climat : la commission mixte paritaire tombe d'accord, Actualités du droit, 25 juill. 2019), la loi est venue instaurer « l’urgence écologique et climatique ». Sans réelle portée juridique, elle est censée témoigner de la prise en compte des enjeux environnementaux par le législateur.

L’objectif de neutralité carbone d’ici à 2050 est maintenu. Le texte le définit comme « un équilibre, sur le territoire national, entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre ». Pour y parvenir, le Sénat espère une baisse de 40 % de la consommation d’énergies fossiles par rapport à 2012 d’ici 2030, contre 30 % précédemment.

Le texte prévoit un renforcement de la place des énergies renouvelables, notamment concernant l’hydroélectricité (avec un objectif de plus de 27,5 GW produits en 2028), l’éolien en mer (1 GW par an) et le biogaz (8% du mix énergétique en 2028). L’hydrogène est aussi évoqué notamment dans le développement de l'hydrogène bas-carbone et renouvelable et de ses usages industriel, énergétique et pour la mobilité. La perspective est d'atteindre environ 20 à 40 % des consommations totales d'hydrogène à l'horizon 2030.

Toujours dans le domaine de l’énergie, le délai pour atteindre l’objectif de 50 % de nucléaire dans le mix énergétique a été rallongé à 2035, contre 2025 dans le projet original. Le Sénat, dans la dernière version du texte, est par ailleurs venu renforcer les mesures sociales pour les salariés des 4 dernières centrales à charbon dont la fermeture a bien été confirmée par la loi pour 2022. Ces mesures d’accompagnement ont également été étendues aux sous-traitants. À noter qu’à l’heure actuelle, il n’existe pas de dispositions similaires pour les salariés du nucléaire, malgré les fermetures de 14 réacteurs prévues d’ici 2035.

Autre point, le Sénat a validé la prise en compte systématique du bilan carbone dans les appels d’offre pour les projets d’énergie renouvelable. Le communiqué de presse souligne la volonté de lutter contre le « dumping environnemental » dont sont parfois victimes les industriels français et européens.

Des réactions mitigées
Probablement un des sujets les plus vivement discutés au cours du processus législatif (v. Projet de loi Énergie et Climat : la commission mixte paritaire tombe d'accord, Actualités du droit, 25 juill. 2019) : les « passoires thermiques », ces 7 millions de logements mal isolés causant des surconsommations d’énergie. Certaines ONG regrettent que les dispositions liées à l’interdiction de location de ces logements dès 2025 aient disparu pour être finalement remplacées par des mesures plus progressives. Pour rappel, le logement représente 45 % des consommations d'énergie et 25 % des émissions de gaz à effet de serre en France. L’objectif affiché de la ministre Élisabeth Borne est « l’éradication » des passoirs thermiques d’ici 2028.

Le communiqué de presse du Sénat souligne aussi une prise en compte des bâtiments publics, puisque les élus locaux disposeront d’une « boîte à outils » permettant leur rénovation.

Anne Bringault du Réseau Action Climat (RAC) regrette que, sur ce sujet, la loi ne soit pas assez ancrée dans la réalité. « Sur la rénovation, on va juste faire en sorte que les logements qui sont les moins bien isolés (…) soient considérés comme non conformes en 2028, mais il n'y a rien pour les rénover d'ici là, donc on ne met pas du tout les moyens en place pour tenir les objectifs ; on va se revoir l'année prochaine avec des résultats qui sont encore dans le rouge ».

De manière plus générale, le rapporteur pour le Sénat Daniel Gremillet a souligné la nécessité de financements adéquats aux attentes. Sur cette thématique, Roland Courteau, sénateur socialiste a regretté que l’urgence climatique doive « attendre d’hypothétiques financements ».

Enfin, à noter qu’en hommage au président Jacques Chirac, le sénateur Jean-François Husson a tenu à paraphraser ses propos sur le changement climatique qui semble refléter le Zeitgeist actuel : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs ».
 
Source : Actualités du droit