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Quel encadrement juridique pour les PME/ PMI dans l’espace OHADA ? 2/3

Afrique - Ohada
23/10/2019
Quel encadrement juridique des PME/ PMI dans l’espace OHADA ? Le point avec Komlanvi Issifou AGBAM, doctorant en cotutelle de thèse (Université Laval- Université de Nantes), spécialité : droit des affaires  internationales (2e partie).
Relativement à leurs secteurs d’activités, les PME et PMI sont classées dans les catégories suivantes : l’industrie manufacturière, agricole ou forestière[1], le commerce de gros[2], le commerce de détail[3], les services[4], les mines[5].

Les paramètres économiques intègrent à la définition les éléments suivants : le nombre de salariés permanents, le chiffre d’affaires, le total bilan. Ces différents paramètres varient en fonction du secteur d’activités.

Si cette définition a le mérite de clarifier la notion de PME/ PMI par secteur, elle n’est malheureusement pas conforme à celle proposée par le législateur communautaire. 

L’article 8 de la Charte togolaise précise que la définition de la PME /PMI est susceptible d’évolution. Il revient donc au législateur togolais de faire usage de cette disposition en adaptant la définition des PME/ PMI à celle proposée dans l’article 2 de la Charte communautaire UEMOA de 2015.

Le législateur togolais pourra garder sa définition par catégorie ou par secteur d’activités mais devrait impérativement faire évoluer les paramètres économiques notamment le seuil du chiffre d’affaires annuel hors taxes et celui de l’effectif permanent.
  • Loi Uniforme du 6 juin 2019 relative au crédit-bail.
  • Décret du 19 mai 2014 déterminant la forme des statuts et le capital social de la SARL
Le législateur togolais, par ce décret, offre aux opérateurs économiques le choix entre l'acte notarié et l'acte sous seing privé pour la constitution des SARL (art.2) et rend également optionnelle l'intervention du notaire pour la déclaration notariée de souscription et de versement (article 6). Le capital social minimum est fixé à 100 000 F CFA (cent mille francs) (art. 3).
  • Décret du 20 décembre 2017 modifiant le décret du 19 mai 2014 déterminant la forme des statuts et le capital social de la SARL.

Suppression de l’obligation de constitution d'un capital social minimum et du recours au notaire lors de la création des SARL).
  • Le montant du capital social pour la constitution de la SARL, librement déterminé par les associés, est fixé par les statuts (Article 3 nouveau)
  • Le capital social est divisé en parts sociales égales dont la valeur nominale est librement fixée par les statuts. (Article 4 nouveau)
Arrêté interministériel du 10 septembre 2014 déterminant les conditions de garantie d'authenticité de statuts SARL établis par acte sous seing privé.


 
  • Les statuts sous seing privé doivent être établis conformément au modèle de statuts types, disponibles au comptoir du CFE ou sur le site www.afetogo.tg Il y a donc une sorte de liberté encadrée.
                                               BENIN
  • Décret du 25 août 2005 portant Charte nationale des PME/ PMI
Le texte définit en son article 3 la PME comme étant « Toute entreprise légalement constituée  tenant une comptabilité régulière, qui n’est pas une filiale d’une multinationale et qui satisfait au critère d’un effectif de 5 à 99 employés permanents puis d’un capital social compris entre 1 million et 50 millions de FCFA ou des investissements d’un montant compris entre 5 millions et 500 millions de FCFA ». Le législateur béninois retient les critères d’effectif, du capital social et du niveau d’investissement.

Cette disposition à la mérite de proposer une définition générique des PME contrairement à la Charte togolais. Toutefois, il faut retenir que la définition de la PME dans la Charte béninoise n’est pas conforme à celle retenue dans la Charte communautaire UEMOA. Une réforme de la dite charte s’impose.

Il faut noter par ailleurs, que la Charte comporte plusieurs mesures en faveur des PME. Il s’agit entre autres des mesures relatives au financement des PME, l’accès au PME aux marchés publics, à la promotion de la sous-traitance, des aides public  à l’emploi, aux avantages fiscaux.
  • Décret présidentiel n°2014-220 du 26 mars 2014[6] modalités de création des SARL en République du Bénin[7]
Par ce texte, auquel sont annexés des statuts-type, le législateur béninois prévoit que les statuts de la SARL unipersonnelle ou pluripersonnelle sont établis par acte sous seing privé (art. 2) et que les associés fixent librement le montant du capital social dans ce type de société (art. 6).

Cette disposition est un levier de facilitation du processus de création d’entreprise aux jeunes entrepreneur.  Elle est conforme aux exigences du droit OHADA notamment à l’AUDSC réformé en 2014.

                                            SENEGAL

Loi d’orientation n°2008-29 du 28 juillet 2008 relative à la promotion et au développement des PME, modifiée par la loi n°2012-32 du 31 décembre 2012. C’est le cadre législatif de référence sur les PME ;
  • Le projet de loi d’orientation de 2018 relative aux PME ;
L’objectif assigné au projet[8] de 2018 est d’abroger la loi de 2008 considérée comme inadaptée à l’environnement économique et juridique au Sénégal, dans l’espace UEMOA et la zone OHADA en fixant un nouveau cadre général de la politique de promotion des PME au Sénégal.

Le projet de loi comporte 36 articles  et prévoit entre autres, la création d’un Conseil National de la PME nationale[9], des dispositions relatives au financement des PME, des mesures d’incitation et de soutien à la PME nationale, la création d’un Fonds pour la promotion des PME, la promotion du crédit-bail en vue de faciliter l’investissement aux PME.

Il définit en son article 3 la PME comme étant, « toute personne physique ou morale autonome, commerçante ou productrice de biens et/ou services marchands, et dont le chiffre d’affaires hors taxes annuel n’excède pas deux milliards (2.000.000.000) de F CFA ; toute PME dont plus de 25% de part de capital est directement détenue par une entreprise privée ou publique, autre que les sociétés de capital-risque et les investisseurs institutionnels, perd cette qualité au sens de la présente loi ». 

Le dernier alinéa du même article précise que « la PME comprend l’Entreprenant, la Très Petite Entreprise (TPE), la Petite Entreprise (PE) et la Moyenne Entreprise (ME) ». Le législateur Sénégal intègre expressément l’entreprenant dans la définition de la PME. C’est une évolution par rapport à la loi de 2008 modifié en 2012. Cette précision vient clarifier les disposition de l’alinéa 1 qui évoque « la personne physique » dans la définition de la PME.

Le législateur Sénégal distingue dans le projet de 2018 plusieurs types de PME à savoir la PME de droit communautaire[10], la PME de droit sénégalais[11] et la PME de droit nationale.[12]

À la lecture de la définition de PME proposée par le législateur sénégalais, quelques imprécisions apparaissent :
  • L’omission de certains critères économiques qui normalement sont des standards dans la définition de la PME. Il s’agit du « nombre de salariés permanent », du niveau d’investissement ;
  • La méconnaissance du seuil retenu pour le chiffre d’affaire annuel par la charte communautaire UEMOA ;
  • L’absence de référence à l’inscription au RCCM ou à tout autre registre conférant au PME une personnalité juridique.
Le texte va au-delà du seuil « d’un milliard » de chiffre d’affaires annuel hors taxe retenu par la charte communautaire UEMOA[13].

Il est important que le législateur sénégalais prenne en compte ces différentes imprécisons et omissions avant l’adoption finale du texte.
  • Loi N° 17/2014 du 15 avril 2014 portant fixation du capital social minimum de la société à responsabilité limitée.
La loi sénégalaise de 2014 déroge à l'AUDSG sur la seule question du capital social minimal de la SARL, qu'elle fixe à 100 000 F CFA (cent mille francs) (article 1er). (Recours au notaires obligé). Le lobbying des notaires au Sénégal n’est pas tombé.

                                        COTE D’IVOIRE
  • Loi n° 2014-140 du 24 mars 2014 portant promotion des PME ;
Le texte comporte 31 articles regroupés en 7 chapitres notamment sur la notion de PME, l’acquisition et perte de la qualité de PME, le cadre institutionnel de promotion des PME, les mesures d’aide et de soutien aux PME, les mesures d’aide et de soutien spécifiques aux PME.

Il définit la PME en son article 4 comme étant « toute entreprise productrice de bien et / ou de services marchands, qui emploie en permanence moins de deux cents personnes et qui réalisent un chiffre d’affaire annuel hors taxe n’excédant pas 1 milliard de FCFA ». Cette définition est conforme à celle proposée par la Charte UEMOA.

Il prévoit entre autres, la mise en place d’un fonds d’investissement en faveur des PME[14],  la facilitation aux PME l’accès au foncier par des mesures appropriées qui mettent notamment l’accent sur la rapidité de mise à disposition des terrains[15].

L’article  prévoit la possibilité pour l’Etat de réserver exclusivement aux PME certains Marchés Public[16]. Cette disposition souffre de précisions notamment le type, le pourcentage  ou la proportion de marchés publics à réserver aux PME[17].

Or, l’UEMOA recommande à Chaque Etat membre et ses démembrements (collectivités locales, entreprises du secteur public et parapublic) de soumettre les marchés publics dont le montant est égal ou inférieur à cinquante millions (50 000 000) de CFA à une concurrence entre les PME, sans pour autant influer sur les lois du marché en règle générale. Les Etats membres réservent une part des marchés publics réservés aux PME, à celles dirigées par des femmes.  Ils en déterminent le pourcentage[18].

[1] Dans ce secteur, est définie comme :
- une moyenne entreprise industrielle, agricole ou forestière, une entreprise qui emploie moins de 100 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 500 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 750 millions de francs CFA.
 -une petite entreprise industrielle, agricole ou forestière, une entreprise qui emploie moins de 50 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 250 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 250 millions de francs CFA.
- une micro entreprise industrielle, agricole ou forestière, une entreprise qui emploie moins de 10 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 30 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède
pas 20 millions de francs CFA.
[2] Est définie comme :
- une moyenne entreprise, une entreprise qui emploie moins de 50 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 250 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 250 millions de francs CFA.
- une petite entreprise, une entreprise qui emploie moins de 50 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 200 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 150 millions de francs CFA.
- une micro entreprise, une entreprise qui emploie moins de 5 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 30 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 15 millions de francs CFA
[3] Est définie comme :
- une moyenne entreprise, une entreprise qui emploie moins de 50 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 250 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 250 millions de francs CFA.
- une petite entreprise, une entreprise qui emploie moins de 30 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 100 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 50 millions de francs CFA.
- une micro entreprise, une entreprise qui emploie moins de 5 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 30 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 10 millions de francs CFA
[4] Est définie comme :
- une moyenne entreprise, une entreprise qui emploie moins de 50 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 250 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 250 millions de francs CFA.
- une petite entreprise, une entreprise qui emploie moins de 30 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 100 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 75 millions de francs CFA.
- une micro entreprise, une entreprise qui emploie moins de 10 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 30 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 10 millions de francs CFA.
[5] Est définie comme :
- une moyenne entreprise, une entreprise qui emploie moins de 50 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 250 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 250 millions de francs CFA.
- une petite entreprise, une entreprise qui emploie moins de 30 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 100 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 75 millions de francs CFA.
- une micro entreprise, une entreprise qui emploie moins de 10 salariés permanents et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 30 millions de francs CFA ou le total bilan n’excède pas 10 millions de francs CFA.
[6]  Il est entré en vigueur le 5 mai 2014.
[7] Suppression de l’obligation de constitution d'un capital social minimum et du recours au notaire lors de la création SARL.
[8]  Il résulte des dispositions de l’article 38 que « la présente loi abroge la loi d’orientation n° 2008-29 du 28 juillet 2008 relative à la promotion et au développement des petites et moyennes entreprises ».
[9] Article 9
[10] toute entreprise individuelle, ou une société, immatriculée dans un des pays membres de la CEDEAO et de l’UEMOA dont le chiffre d’affaires annuel hors taxes est inférieur ou égal à 2.000.000.000FCFA.
[11] PME de droit sénégalais : toute entreprise individuelle ou une société, immatriculée au Sénégal dont le capital est détenu par une ou des personnes physiques ou morales quelle que soit leur nationalité et dont le chiffre d’affaires annuel hors taxes est inférieur ou égal à 2.000.000.000FCFA.
[12] toute entreprise individuelle ou une société de droit sénégalais dont le capital est détenu à 51%, au moins, par une ou des personnes physiques de nationalité sénégalaise ou par une ou des personnes morales de nationalité sénégalaise et dont le chiffre d’affaires annuel hors taxes est inférieur ou égal à 2.000.000.000FCFA
[13]  La Charte communautaire UEMOA retient un seuil d’un milliard. Elle a été prise en compte par le législateur ivoirien et burkinabè ( voir article 4 de la loi ivoirienne et burkinabè portant orientation des PME).
[14] Article 17 loi d’orientation des PME de 2014.
[15] Article 22 de la loi d’orientation des PME en CI.
[16] Article 18.
[17] Certains Etats ont  jugé utile de préciser la proportion de marchés publics à réserver aux PME. L’article 24 de la loi Burkinabè précité énonce par exemple que la « proportion doit être au moins égale à quinze pour cent du montant global des marchés selon des conditions et modalités définies par la règlementation des marchés publics ».
[18] Article 22 de la charte UEMOA précité.
 
 


 
Source : Actualités du droit