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Devoir de conseil du commissionnaire en douane : à demande particulière du client, pas d’obligation d’information générale

Transport - Douane
26/01/2022
Le caractère particulier de la demande – ici s’agissant de la seule existence de taxe sur un produit – d’un importateur à son commissionnaire en douane encadre le devoir de conseil de ce dernier qui, s’il doit bien sûr y répondre, n’a pas à donner toutes les informations générales et complètes relatives à la marchandise et à son importation : ce devoir du professionnel de la douane est en effet limité à la mission confiée par son client, ce que rappelle un arrêt de la cour d’appel de Douai du 20 janvier 2022.
Un importateur voit sa marchandise bloquée par la Douane bulgare à la frontière entre la Turquie et la Bulgarie et doit acquitter une amende dont il demande le remboursement à son commissionnaire en douane, ainsi que le prix de la marchandise. L’opérateur estime en effet notamment que le professionnel de la Douane a manqué à son devoir en ne l’informant pas en particulier de la réglementation relative à sa marchandise, ce qui serait la cause du blocage et du paiement de l’amende
 
Principe : le devoir de conseil limité à la mission
 
Le juge rappelle d’abord certains principes régissant le devoir de conseil (et donc la responsabilité) du commissionnaire en douane agréé, devenu le représentant en douane enregistré (RDE) avec le CDU : « Pèse sur le commissionnaire en douane une obligation de conseil, laquelle s'apprécie largement, en tenant compte de la plus ou moins grande spécialisation du commettant en matière douanière mais ne se conçoit que dans le cadre de la mission qui lui est dévolue. »
 
Application du principe : cas d’une question particulière
 
L’importateur avance un manquement au devoir de conseil par le commissionnaire au titre de l’importation, estimant qu'il était de son devoir de lui faire connaître l'ensemble des conditions d'importation depuis la Turquie vers la France, dès lors qu'il l'avait interrogé.
 
Mais pour le juge qui fonde sa solution dans les preuves rapportées par les échanges de mails, le courriel de l’importateur porte uniquement sur une demande de renseignements, particulièrement circonscrite à l’existence de taxes à l'importation pour ses marchandises, demande à laquelle le commissionnaire a répondu en précisant l'existence d'une taxation à 5,5 % et une TVA à 20 % avec exonération des droits de douane en cas d'obtention de l'ATR. Il ne s'agissait aucunement d'une interrogation générale de l’importateur sur les conditions d'importation depuis la Turquie vers la France, contrairement à ce qu'il allègue. Aussi, il ne saurait être reproché au commissionnaire de douane de ne pas avoir procédé à une information générale et complète sur les règles applicables à ce produit et sur les restrictions existant à l'importation.
 
Le juge ajoute encore que, même si le client n'avait jamais importé un tel produit (ce que le commissionnaire n'ignorait pas) et s'était trompé sur le code douanier dans sa demande, au vu du caractère particulièrement limité et précis de la demande d'information, le professionnel de la douane ne pouvait se douter de l'ignorance par l’importateur des conditions d'importation d'un tel produit, lequel n'est pas interdit mais strictement encadré (conditionnement, quotas, agrément), et n'avait aucune obligation d'interroger l’importateur sur l'étendue de ses connaissances pour lui permettre de le renseigner sur des questions étrangères à l'interrogation adressée et n'étant rattachée même à aucune opération de transport précise.
 
Remarques
Sur le point ci-dessus, un autre devoir du commissionnaire est également rappelé par le juge : « Le commissionnaire en douane, en sa qualité de professionnel de la réglementation douanière, doit accomplir les formalités douanières d'importation ou d'exportation pour le compte de son client, ce qui suppose qu'il recueille les informations nécessaires sur la marchandise pour pouvoir remplir les différentes déclarations et effectuer les formalités qui s'imposent en fonction des informations obtenues. »
 
Plus d’information sur ce sujet dans le millésime 2021 du Lamy transport, tome 2, voir no 233 et s. L’arrêt ici présenté est intégré dans la version en ligne du millésime 2022 à venir de cet ouvrage sur Lamyline dès que possible.
 
 
 
Source : Actualités du droit