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Effet relatif du contrat

Transport - Informations professionnelles
10/05/2021
Les contrats obligent les parties qui les ont faits, de sorte que ceux qui ne les ont pas faits – les tiers – ne peuvent ni demander leur exécution, ni se voir contraints de les exécuter : les articles 1199 et 1200 du code civil (anc. C. civ., art. 1165) posent le principe de l’effet obligatoire des contrats à l’égard des parties et de leur effet relatif à l’égard des tiers. L’article 1103 du code civil (C. civ., anc. art. 1134, al. 1er) précise que lesdits contrats sont la loi des parties qui ont consenti à leur formation. Retour sur l’implication de cet effet relatif en transport.
 
► Inopposabilité des termes du contrat de vente au transporteur
Cette règle ne permet pas au transporteur de se prévaloir des clauses du contrat de vente – préalable et cause de son intervention – ni de se les voir imposées par le vendeur ou l’acheteur, et ce même s’il en a connaissance. C’est ainsi qu’un transport, prévu en port dû dans le contrat de vente, ne peut libérer le destinataire de son obligation de s’acquitter du coût du port au motif qu’il relève de son vendeur, qu’une vente internationale sous la règle Incoterms® reste étrangère au transporteur (Cass. com., 27 sept. 2016, n° 14-29.644, Lamyline.), ou encore que les mentions figurant sur une facture de vente sont inopposables au transporteur, à moins qu’elles soient reportées sur le document de transport (CMR, art. 11 ; contrat type « général », art. 3.6 ; Cass. com., 26 mai 1992, n° 90-18.699, Lamyline).
Inversement, les termes du contrat de transport – tels les plafonds d’indemnisation – ne peuvent pas être opposés au vendeur et à l’acheteur, à moins que l’un ou l’autre ait conclu le contrat de transport en étant soit le donneur d’ordre (contrat type « général », art. 2), soit l’expéditeur ou le destinataire lesquels, bien que n’ayant pas conclu personnellement le contrat de transport, y sont néanmoins considérés comme partie et donc des faux tiers (entorse à l’effet relatif du contrat).

► Action en responsabilité réservée aux parties au contrat de transport
Cette règle renferme, en principe, le droit d’agir en responsabilité contractuelle à l’encontre du transporteur aux seules parties au contrat de transport que sont l'expéditeur, le destinataire, et éventuellement le commissionnaire de transport. Pour cette raison, le propriétaire de la marchandise transportée, qui n’est ni l’expéditeur ni le destinataire, n’est pas fondé à agir sur le fondement de cette responsabilité.
Mais, l’assureur, qui a réglé l'indemnité d'assurance et qui se retrouve légalement ou conventionnellement subrogé dans les droits et actions de l'assuré à concurrence de cette indemnité, peut se prévaloir de ce contrat. En outre, le vendeur départ, qui est renseigné comme expéditeur sur le document de transport et qui intervient au chargement de la marchandise, est qualifié d’expéditeur et donc de partie au contrat de transport. Il peut par voie de conséquence engager la responsabilité contractuelle du transporteur.
 
☞ : N.B. : Les tiers au contrat de transport peuvent agir à l’encontre du transporteur sur le terrain délictuel, après avoir démontré sa faute dans la survenance du dommage.

► Indemnité d’assurance transport et contrat de vente
L’assureur, étranger au contrat de vente, ne peut pas davantage se prévaloir des dispositions de ce dernier relatives au transfert de risques pour échapper à l’indemnisation due. Seules doivent être prises en compte les stipulations de la police d’assurance (Cass. com., 6 févr. 1985, n° 83-14.919, Bull. civ., n° 49). Cependant, l’acheteur qui obtient la résolution de la vente et la restitution du prix de la marchandise ne peut pas réclamer une indemnité d’assurance.

► Indemnité d’assurance transport et contrat de transport
L’assureur, n’ayant pas fait le contrat de transport, doit se tenir là encore, aux termes de la police d’assurance pour accorder ou non sa garantie (Cass. com., 24 mars 2004, n° 02-14.182, BTL 2004, p. 264, Lamyline).
Il résulte de ce qui précède que celui qui – le tiers – n’a pas conclu le contrat de transport, le contrat de vente ou encore le contrat d’assurance, ne peut pas être débiteur des obligations qui en découlent. Il ne peut pas non plus en exiger l’exécution. Lorsque la mauvaise exécution de ce contrat lui cause un préjudice, il « ne peut que » se prévaloir des règles de la responsabilité civile de droit commun et démontrer une faute objective, et non un simple manquement contractuel.
Le contrat n’est donc pas complètement intouchable, comme pouvait le laisser entendre la rédaction de l’ancien article 1165 du code civil (devenu C. civ., art. 1199 et par C. civ., art. 1 200). Aussi, parce que cette situation juridique créée par le contrat doit être respectée par lesdits tiers, ceux-ci ne peuvent pas en ignorer l’existence. C’est pour cette raison que le contrat leur est opposable par les parties et peut être invoqué par les tiers aux parties comme un fait juridique, afin de démontrer la valeur de la marchandise transportée ou peut-être même l’existence du contrat de transport (Cass. com., 22 oct. 1991, n° 89-20.490, Bull. civ., IV, n° 302 et C. civ. art. 1200).
 
* C. civ., art. 1199, anc. C. civ. art. 1165.
 
Source : Actualités du droit