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Détention provisoire et droit au maintien des liens familiaux

Pénal - Peines et droit pénitentiaire, Procédure pénale
22/01/2021
Le Conseil constitutionnel a jugé, dans une décision du 21 janvier 2021, que le fait de déterminer le lieu d’incarcération d’une personne placée en détention provisoire, au cours d’une instruction, sans imposer la prise en compte du lieu du domicile de sa famille, n’est pas contraire à la Constitution.
Pour rappel, l’article 22 de la loi du 24 novembre 2009 (L. n° 2009-1436, 24 nov. 2009, JO 25 nov) pose le principe selon lequel « L'administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits ». L’article 35 prévoit que « Le droit des personnes détenues au maintien des relations avec les membres de leur famille s'exerce soit par les visites que ceux-ci leur rendent, soit, pour les condamnés et si leur situation pénale l'autorise, par les permissions de sortir des établissements pénitentiaires. Les prévenus peuvent être visités par les membres de leur famille ou d'autres personnes, au moins trois fois par semaine, et les condamnés au moins une fois par semaine ».
 
Des questions prioritaires de constitutionnalité portant sur ces dispositions ont été posées (v. Détention provisoire et respect de la vie privée et familiale : renvoi d’une QPC, Actualités du droit, 22 oct. 2020). Il leur est notamment reproché de ne pas tenir compte du droit au maintien de ses liens familiaux, pour la détermination du lieu d’incarcération d’une personne en détention provisoire pendant l’instruction de l’affaire. « Lorsque le lieu de détention est trop éloigné du domicile familial, la personne incarcérée se trouve privée du bénéfice effectif du droit de visite par les membres de sa famille » est-il souligné.
 
Le Conseil constitutionnel, dans une décision du 21 janvier 2021, note que l’article 714 du Code de procédure pénale précise que les personnes placées en détention provisoire sont incarcérées dans une maison d’arrêt. Le lieu d’exécution est « en principe, situé à proximité du lieu ou siège la juridiction d’instruction devant laquelle la personne mise en examen est appelée à comparaître ». Néanmoins, lorsque l’instruction est achevée, la personne maintenue en détention provisoire dans l’attente de sa comparution devant la juridiction de jugement, « peut bénéficier d'un rapprochement familial dans les conditions prévues par l'article 34 de la loi du 24 novembre 2009 ».
 
Ainsi, au cours de l’instruction, aucune disposition n’impose de tenir compte du lieu du domicile de la personne ou des membres de sa famille pour déterminer le lieu d’exécution de la détention provisoire.
 
Toutefois le Conseil note que :
- la détermination du lieu d’exécution de la détention provisoire à proximité du siège de la juridiction d’instruction est justifiée par les besoins de l’instruction et par la nécessité de faciliter l’extraction de la personne détenue pour permettre au magistrat instructeur de « procéder aux interrogatoires, confrontations, reconstitutions et autres mesures d'investigation impliquant la présence physique de cette personne » ;
- la détention provisoire ne peut excéder les durées maximales fixées par les articles 145-1 et 145-2 du même Code ;
- au cours de l’instruction, plusieurs garanties contribuent à maintenir les liens des personnes détenues avec leur famille comme le droit à une visite trimestrielle dans une unité de vie familiale ou un parloir familial donc la durée est fixée « en tenant compte de l’éloignement du visiteur » ou celui de téléphoner aux membres de sa famille et de correspondre par écrit avec toute personne.
 
Les Sages jugent donc qu’ « en déterminant le lieu d'incarcération d'une personne placée en détention provisoire, au cours d'une instruction, sans imposer la prise en compte du lieu du domicile de sa famille, le législateur n'a pas privé de garanties légales le droit de mener une vie familiale normale dont bénéficient les intéressés dans les limites inhérentes à la détention provisoire ». Les dispositions doivent donc être déclarées conformes à la Constitution.
 
 
Source : Actualités du droit